Des politiques aux journalistes, dans le monde du travail et en dehors, le mot senior est en ce moment sur toutes les lèvres, notamment avec la réforme des retraites qui fait la une de l’actualité. Si certains l’apprécient, pour d’autres (et souvent pour les personnes concernées), il sonne creux. Loin de ne désigner qu’une catégorie d’âge, le mot senior recouvre des réalités très différentes. Mais alors, qui sont vraiment les seniors ?
Nous sommes tous le senior de quelqu’un
À l’origine, le mot « senior » signifie « plus âgé que » en latin. Le mot sénat (« senatus »), qui signifie conseil des anciens, a la même racine. Vous l’aurez compris, dès lors, l’idée du « senior » est extrêmement subjective : plus âgé que qui ? Difficile de donner une seule et unique réponse à cette question.
Ainsi, dans le monde du travail, les seniors désignent les plus de 50 ans, qui sont pourtant bien loin de l’âge légal de la retraite. Dans les domaines apparus récemment comme l’intelligence artificielle ou encore l’informatique, on est parfois considéré comme senior à 35 ans, dès que l’on a une dizaine d’années d’expérience (par opposition à un jeune diplômé de 25 ans). À l’origine, il s’agissait d’un terme connoté positivement, suggérant l’expérience et le savoir-faire. Cependant, aujourd’hui, dans certains corps de métiers, les cinquantenaires ont de plus en plus de mal à se faire recruter. Les entreprises font du jeunisme et privilégient de jeunes recrues considérées, souvent à tort, comme plus dynamiques et moins rigides. Il s’agit bel et bien d’une idée reçue, car de nombreux seniors se distinguent au contraire en entreprise par leur sens de l’adaptation !
Autre exemple marquant : celui du sport de haut niveau. Dans la plupart des disciplines, les sportifs sont considérés comme seniors dès leur trentaine. Ils prennent leur retraite en début de quarantaine. Enfin, dans la publicité, les marques considèrent les consommateurs comme des seniors à partir de 50 ans. Ils font dès lors l’objet de campagnes marketing bien précises qui leur sont spécifiquement destinées. Hors du cadre professionnel et médiatique, on considère généralement qu’une personne est « senior » à partir de 60 ans. C’est le cas chez les professionnels de santé par exemple. C’est d’ailleurs souvent à partir de 60-65 ans que l’on a accès à des réductions senior ou à des tarifs préférentiels pour certains services comme le train, la mutuelle senior, la complémentaire santé. En politique, le mot « senior » tend à remplacer peu à peu le terme « retraités » (qui exclut les personnes sans activité professionnelle) et l’expression « nos aînés », perçue comme infantilisante.
Qui sont les seniors ?
Cependant, le mot « senior » ne fait pas l’unanimité : on lui reproche notamment d’être un euphémisme politiquement correct pour éviter de dire les mots « vieux » ou « personne âgée », comme s’ils étaient tabous. Cependant, le principal problème que pose ce terme, c’est qu’il regroupe, dans une catégorie unique, des réalités très différentes. En effet, le quotidien d’une personne de 65 ans est très différent de celui d’une personne de 90 ans ! Vingt-cinq années les séparent et elles n’ont pas les mêmes besoins, ni les mêmes contraintes, comme le montre notre baromètre annuel.
Or, l’image médiatique du senior est souvent celle d’une personne en perte d’autonomie, qui a besoin d’être aidée au quotidien, qui a des problèmes de santé ou de mobilité… Pourtant, les septuagénaires d’aujourd’hui s’illustrent plutôt par leur dynamisme et leur vitalité, ainsi que par leur curiosité pour les nouvelles technologies. Bref, d’une décennie à l’autre, et même d’une personne à l’autre, les situations changent du tout au tout. Avec l’augmentation de l’espérance de vie, il y a de plus en plus de seniors, donc de plus en plus de diversité dans les situations.
De nouveaux termes pour de nouvelles réalités
Pour pallier ce problème, de nouveaux termes émergent :
- les « jeuniors » pour parler des jeunes seniors (moins de 75 ans), adeptes notamment des outils digitaux ; ceux que l’on appelait autrefois baby-boomers entrent aujourd’hui dans cette catégorie du jeune senior.
- le « grand âge » pour parler des seniors en fin de vie.
- en plus du « troisième âge », on parle désormais du « quatrième âge », pour créer de la nuance entre le début de retraite et la période du grand âge.
Mais alors, qui sont les seniors ? S’ils forment une population très variée, ils ont tout de même des points communs. Ce sont pour la plupart des retraités, qui doivent anticiper à court ou long terme leur vieillissement. Or, à l’heure actuelle, le sujet du vieillissement réussi est au cœur des préoccupations politiques. Certes, les plans anti-chutes ou les plans de prévention de la perte d’autonomie s’adressent principalement aux personnes les plus âgées. Cependant, les avancées obtenues bénéficient à tous les seniors, et à la société dans son ensemble. De ce point de vue, on peut se réjouir qu’un terme générique existe pour donner le plus de visibilité possible aux 60 ans et plus. Une première étape pour faire changer les regards !
